Haïti, entre violences et stratégies d’espoir

Le jeudi 03 octobre 2024, à une centaine de kilomètres de la capitale, 70 personnes ont été massacrées par les gangs. Ce fait tragique est, malheureusement, pas forcément un fait isolé. Au moins 3 661 personnes ont été tuées depuis janvier dans le pays en raison des violences, a indiqué le Haut-Commissariat de l’ONU la semaine dernière. 

Lorsqu’on regarde la situation d’Haïti depuis près de 5 ans, la crise est omniprésente. L’assassinat de Jovenel Moïse en 2021 n’a fait qu’exacerber les tensions déjà existantes dans le pays. Les gangs ont pris le contrôle de certains quartiers de la capitale et les conséquences retombent sur la population. 

Nos Petits Frères et Sœurs vous fait un point sur la situation.

L'action des forces gouvernementales

Les forces armées gouvernementales et les forces de la coalition internationale luttent contre les gangs. Des troupes en provenance du Kenya ont été envoyées sur place pour consolider cette mission pour rétablir l’ordre. L’augmentation de la présence policière a quand même des conséquences sur la population. Les personnes se sentent un petit peu plus en sécurité. Selon la directrice de l’hôpital Saint-Damien, on note une baisse des fusillades et des kidnappings aux abords de l’établissement. En dehors de l’hôpital, la présence policière s’est aussi renforcée au niveau de l’aéroport afin de reprendre le contrôle de cette localisation stratégique.

Lorsqu’on regarde la situation au global, il n’y a pas tant d’évolution. Les difficultés d’accès aux denrées alimentaires couplées avec la hausse du prix de celles-ci rendent la vie assez compliquée. Au-delà de ce phénomène, l’insécurité permanente restreint la liberté de circulation des personnes.
Malgré la rentrée scolaire de début octobre, de nombreuses écoles restent fermées et certaines régions restent inaccessibles du fait de la présence des gangs. Cela s’explique aussi parce que la présence policière n’est pas la même partout. Les forces sont surtout présentes dans la capitale. En conséquence, les dommages collatéraux chez les civils sont nombreux. Les violences du 03 octobre illustrent ce fait.
Au niveau des chiffres, plus de 700 000 personnes sont des déplacés internes en Haïti. Pour la moitié, ce sont des enfants. Selon l’ONU, ce chiffre représente une hausse de 22% par rapport au mois de juin.

La répression des gangs

Le problème avec l’augmentation des forces policières, c’est qu’en réponse, la violence des gangs augmente aussi. Ces derniers continuent d’opérer en toute impunité. Cela se traduit notamment par les blocages de routes et en pratiquant l’extorsion sur les civils.

La menace des gangs se traduit aussi par de l’intimidation. En effet, il y a énormément de vidéos d’intimidation, de menaces et aussi des vidéos qui montrent leurs activités. Au-delà de la simple violence que représente ces gangs, l’impact sur le moral des Haïtiens est énorme. Pour les locaux, tant que l’ensemble des réseaux criminels ne seront pas démantelés, il n’y aura pas de réelle amélioration de la sécurité. Car dans les faits, les gangs se renforcent aussi. Ils arrivent à recruter de nouveaux membres souvent jeunes.

La situation dans nos infrastructures

Toute cette crise dans le pays a une influence sur nos infrastructures. En effet, les entrées et les sorties autour de nos structures représentent un réel risque pour tous. À Tabarre, le risque de fusillades reste élevé avec notamment les balles qui fusent près de notre enceinte.

À Kenscoff, qui est plus éloignée de la capitale, les risques sont moindres.

En ce qui concerne l’hôpital Saint-Damien, même si l’établissement n’a pas fait l’objet de menaces directes, il se situe dans une zone rouge en termes de sécurité. Les nombreux convois de police près de l’hôpital témoignent de la tension ambiante. Il faut constamment s’adapter aux perturbations dans la chaîne d’approvisionnement médicale, qui touchent tous les hôpitaux, les laboratoires, les pharmacies… Les défis logistiques au niveau des ports ont amplifié ces problèmes. Pour maintenir les services essentiels, l’hôpital Saint-Damien est en relation avec des établissements partenaires et essaie de diversifier ses fournisseurs.

Les solutions mises en place

Afin de garantir la pérennité de nos services et la sécurité de chacun, des solutions ont été mises en place. Pour minimiser les risques, les enfants ne sortent pas de nos locaux. Limiter les sorties est le meilleur moyen de les protéger car même les petites sorties représentent un risque. Concernant les cours, des aménagements ont également eu lieu, toujours dans l’idée de limiter les déplacements.
Au niveau des ressources humaines, il y a des problèmes par rapport à l’absentéisme, aux démissions, et aux retards dus aux différents barrages sur les routes. Un roulement de 3 jours pour les employés a été mis en place au sein de notre hôpital, pour anticiper toute absence. La flexibilité est de mise à tous les niveaux. Dans le futur, nous aimerions mettre en place une prime de risques pour le personnel de l’hôpital, qui risque sa vie presque quotidiennement pour remplir sa mission.

Les défis sont nombreux et la situation sur place reste très préoccupante, d’un point de vue sécuritaire global, mais aussi pour nos infrastructures et activités. Dans ce contexte particulièrement difficile, si vous souhaitez soutenir nos actions en faveur des enfants et des familles vulnérables en Haïti, faites un don !